CAMPAGNE ANTI TAUBIRA : UNE INSULTE À L’INTELLIGENCE DE NOTRE PEUPLE.

L’unanimité nationale qui s’est affirmée après les assassinats des 7, 8 et 9 janvier place l’opposition de droite dans une situation difficile. La critique anti gouvernementale devient difficile. Une partie de la droite et de l’extrême droite, de l’Institut pour la Justice à Valeurs Actuelles, a donc choisi de lancer une campagne contre la Ministre de la justice, Christiane Taubira.

L’argument au cœur de cette campagne laisse pantois. Il se résume ainsi : Si les assassins avaient été en prison, ils n’auraient pas été en liberté. S’ils n’avaient pas été en liberté, ils n’auraient pas pu commettre leurs crimes. Christiane Taubira est favorable aux aménagements de fin de peine. Elle est donc responsable des maux du pays et doit quitter le gouvernement. La réforme pénale doit être abrogée.

Pour ses auteurs cette attaque a un double mérite. Tout d’abord elle permet de retrouver une posture d’opposition. Ensuite elle espère isoler ainsi la Garde des Sceaux au sein du gouvernement, en postulant une opposition entre celle-ci et le premier ministre ainsi que le ministre de l’intérieur.

Face à cette campagne, il convient de faire quelques rappels et de rétablir la vérité.

Tout d’abord, le ministre de l’intérieur a rappelé à l’Assemblée Nationale que la collaboration entre la police et la justice avait été parfaite lors des attaques terroristes du début janvier. Les magistrats anti terroristes et la cellule de crise du Parquet de Paris ont parfaitement rempli leur rôle. Il n’y a donc pas de divergence dans l’équipe gouvernementale, ni de difficulté de coordination entre la police et la justice dans la lutte anti terroriste.

Ensuite les assassins soit n’ont jamais fait de prison (Saïd Kouachi), soit sont sortis de prison avant le vote de la réforme pénale le 15 août 2014. Amedy Coulibaly a été incarcéré du 23 mai 2010 au 4 mars 2014. Il a été placé sous bracelet électronique jusqu’au 15 mai 2014, date de la fin de sa peine. Quant à Chérif Kouachy, il a été incarcéré de mai à octobre 2010. Finalement le juge d’instruction a décidé en octobre 2013, qu’il n’y avait pas lieu à le poursuive devant le tribunal correctionnel. Les cinq mois de détention provisoire n’ont correspondu à aucune condamnation. La réforme pénale voulue par le gouvernement tout entier, votée par le Parlement et défendue par Christiane Taubira n’est donc pour rien dans le parcours de ces tueurs.

Quant à l’argument : « s’ils avaient été dedans (en prison), ils n’auraient pas été dehors (en liberté) », il traduit l’immense faiblesse de la pensée de droite et de l’extrême droite sur les questions de délinquance : la sortie de prison n’est jamais pensée. Or, tous ceux qui entrent en prison en sortent un jour. C’est le mérite de la réforme pénale d’août 2014 que de mettre en place, pour la première fois, un système qui vise à suivre et contrôler les sortants de prison qui aujourd’hui ne sont ni suivis ni contrôlés pour 80% d’entre eux. Nous avons près de 40 ans de retard à rattraper sur ce sujet pour nous doter de moyens de contrôle et de suivi satisfaisants. La circonstance que Chérif Kouachi, placé sous contrôle judiciaire entre sa sortie de prison en octobre 2010 et le non lieu de 2013, se serait rendu au Yémen, alors qu’il était astreint à pointer au commissariat, démontrerait que c’est bien ce contrôle qu’il faut renforcer. Cela nécessitera de longues années d’effort, mais c’est une contribution décisive pour augmenter la sécurité dans notre pays.

Enfin l’accusation de laxisme et d’angélisme est tout à fait ridicule. Près 67 000 places de prison sont prévues pour 2019 (contre 58 000 aujourd’hui). Cela portera le nombre de places à un taux d’environ 100 pour 100 000 habitants, largement au dessus des pays scandinaves, un peu supérieur à l’Allemagne et inférieur à celui de l’Espagne et la Grande Bretagne. Près de 30 millions d’Euros ont été investis dans des portiques de sécurité, de nouveaux brouilleurs de portables sont prévus dans les prisons, comme est prévu un plan anti radicalisation. Nous nous sommes dotés d’une nouvelle loi anti terroriste en novembre 2014 et nous allons nous doter d’un fichier des condamnés pour faits de terrorisme, sur le modèle du fichier des délinquants sexuels et auteurs de crimes.

La campagne anti Taubira est dérisoire.