Le travail de la Commission VARINARD est intervenu dans un contexte marqué par une politique toujours plus répressive depuis plusieurs années (Peines planchers), par un discours sur l’insécurité et la lutte contre la délinquance des mineurs très idéologique de la part de Nicolas SARKOZY (Pour les victimes, peu importe l’âge des coupables / Polémique sur la détection à partir de 3 ans des futurs délinquants), et par des échecs lourds de cette politique (émeutes de banlieues, surpopulation carcérale, multiplication des sorties sèches).
Dans le droit-fil de cette logique, quelques préconisations polémiques du rapport ont été habilement distillées ces derniers jours, pour créer la polémique et simplifier à l’extrême le débat public.
Il en est ainsi de la fixation à douze ans de l’âge de la responsabilité pénale.
Cette fixation est une mauvaise idée. Tout d’abord en raison du fait qu’il devient possible d’incarcérer en cas de crimes dès l’âge de 12 ans au lieu de 13 ans. Mais il ne s’agit que de 30 cas par an (la commission a par ailleurs recommandé l’interdiction de l’emprisonnement avant 14 ans pour les délits alors qu’il est aujourd’hui possible dès 13 ans). Mais surtout parce que le nouveau système préconisé est très défavorable pour les victimes. En dessous de 12 ans, l’irresponsabilité pénale est désormais absolue. Cela signifie qu’il n’y aura plus d’enquête pénale, quels que soient les faits. Les victimes devront se contenter de demander au tribunal civil une indemnisation en argent par les parents. Les victimes devront constituer elles-mêmes le dossier à défaut d’enquête. La Ministre choisit donc l’annonce médiatique (augmentation factice de la sévérité) au détriment du droit des victimes.
De la même manière, la création d’un tribunal correctionnel spécial pour juger les dossiers mixtes (avec des auteurs majeurs et mineurs), les mineurs de 16 à 18 ans en double récidive et les jeunes majeurs jusqu’à 19 ans, est une proposition peu applicable. Elle déroge gravement au principe constitutionnel qui exige que les mineurs soient jugés par un tribunal différent de celui des majeurs. Elle n’est que pur affichage politicien d’une fermeté factice.
Alors que pour l’essentiel, le rapport de la commission, comme cela avait été le cas avec le Rapport Parlementaire sur l’exécution des décisions de justice pénale concernant les personnes mineures, prend à contre-pied cette idéologie et cette politique.
Concernant par exemple le débat sur la lutte contre la récidive des mineurs, que le gouvernement a voulu trancher en instaurant des peines planchers, nous opposions à cette logique purement répressive celle d’une plus grande rapidité de la justice des mineurs, d’une meilleure visibilité de la graduation des peines, d’une procédure permettant de responsabiliser positivement les mineurs.
La proposition de césure faite par la commission, qui permet d’une part un jugement rapide sur la culpabilité, une indemnisation rapide des victimes, et d’autre part un renvoi à six mois le prononcé de la peine pour permettre une mise à l’épreuve du mineur, rejoint largement notre approche.
La généralisation de l’accès aux aménagements des peines de prison (libération conditionnelle, permission de sortie, placement en semi-liberté, placement en chantier extérieur…), de manière à suivre le jeune lors de son retour en milieu ordinaire est également en phase avec nos propositions. Ainsi l’aménagement de peine sera possible à tout moment de l’exécution, y compris pour les récidivistes. Bien plus cet aménagement sera obligatoire pour les peines de moins d’un an. Il le sera également lorsque 2/3 de la peine auront été effectués.
Sont également des mesures utiles le maintien de la double compétence du juge des enfants, à la fois juge de l’enfance en danger et de l’enfance délinquante ; la fixation de la majorité pénale à 18 ans ; le mandat de placement donné à la Protection judiciaire de la jeunesse pour décharger le juge de la recherche laborieuse d’un foyer éducatif.
Ainsi, un ensemble de propositions positives, efficaces et non idéologiques nous font avoir sur une grande part de ce rapport un avis favorable.
Lorsque le Ministère présentera le projet de loi de réforme de l’ordonnance de 1945, nous saurons rappeler au gouvernement l’essentiel du travail de la Commission, afin de ne pas laisser ce débat important pour notre jeunesse et pour notre pays, être instrumentalisé une fois de plus par l’approche idéologique, simpliste et contre-productive qui a prévalu lors des projets de lois des dix-huit derniers mois sur les questions de justice.